La loi de 1996 ?
Depuis des mois, les syndicats se mobilisent contre la vie chère. Une des revendications des représentants des travailleurs est la révision de la “loi de 1996”. Ecolo souhaite aussi corriger cette loi. C’était inscrit dans son programme en 2019.
La loi du 26 juillet 1996 relative à la promotion de l’emploi et à la sauvegarde préventive de la compétitivité, appelée plus communément “loi de 1996”, a institué, entre autres, le mécanisme de la “norme salariale”. L’objectif officiel est d’éviter un “handicap salarial” de la Belgique afin de ne pas compromettre la compétitivité de nos entreprises. La “comparaison” se fait avec trois pays voisins : l’Allemagne, les Pays-Bas, la France.
Dans les faits, cette loi cadenasse les salaires et empêche les interlocuteurs sociaux de les négocier collectivement et librement. Par exemple, pour 2021 et 2022, la marge maximale pour les augmentations salariales est de 0,4 % (hors indexation automatique et hors indexations barémiques). Par contre, les entreprises bénéficiaires peuvent continuer à verser des dividendes aux actionnaires sans que ceux-ci soient limités.
La loi de 1996 a été révisée en 2017 par le gouvernement Michel et a amené un “durcissement”, non seulement en rendant la norme impérative (alors qu’elle était indicative) mais en ajoutant aussi des éléments dans le mécanisme qui permet de calculer la norme qui réduisent encore plus la marge de négociation des salaires (ne pas tenir compte d’une partie des réductions de cotisations sociales patronales pour calculer le “coût” salarial belge, application d’un “terme de correction” automatique et obligatoire, “marge de sécurité”…).
Ecolo veut revoir et corriger la “loi de 1996”
Ecolo veut corriger la loi de 1996 sur la compétitivité pour redonner des marges de négociation salariale aux travailleurs et travailleuses, pour rétablir le caractère indicatif de la norme salariale et pour prendre en compte des facteurs de compétitivité autres que le salaire dans la comparaison avec les pays voisins. Il s’agit également de revoir la manière dont est “calculée” la norme salariale.
Corriger la loi
Pour augmenter les salaires et agir sur la répartition des richesses
Les différentes crises (Covid 19, flambée des prix de l’énergie….) et la situation socio-économique qui en découle amènent de nombreuses familles à connaître des difficultés à “joindre les deux bouts”. Il est urgent de pouvoir agir sur les salaires. Les travailleuses et travailleurs contribuent à créer de la richesse. Il n’est pas normal que, dans les secteurs qui génèrent des bénéfices, on limite la part qui doit revenir aux travailleurs, alors qu’il n’y a pas de limites à la distribution des dividendes.
De manière plus générale, la part des salaires dans la valeur ajoutée ne cesse de diminuer. Cette loi cadenasse une bonne part du débat sur la valeur ajoutée, la manière de la créer et de la répartir.
Augmenter les salaires, c’est aussi agir sur les inégalités salariales entre les hommes et les femmes. Aujourd’hui, le travail précaire se décline souvent au féminin …dans des secteurs qui font d’énormes bénéfices (grande distribution, titres-services…), où il serait possible de négocier des augmentations de salaire brut si la norme salariale ne l’interdisait pas.
Parce que la compétitivité ne repose pas que sur les salaires
La question de la compétitivité se pose de manière très différente d’un secteur à l’autre, mais également d’une entreprise à l’autre. Certains secteurs sont fortement confrontés à la concurrence étrangère, d’autres pas du tout. Une norme impérative plurisectorielle n’a pas de sens économique.
Mais surtout, la compétitivité ne repose pas que sur les salaires. Si l’on se penche sur la compétitivité en lien avec les “coûts de production”, outre les “coûts salariaux” (productivité du travail), il y a lieu de prendre en compte les “coûts du capital” et les autres coûts de production (énergie, eau, matières premières importées….), ainsi que les composantes macro-économiques telles que l’inflation, les taux de change, etc.
Si l’on se penche sur la compétitivité hors coûts, il y a lieu de prendre en compte la RD, la formation, l’innovation, etc.
Il est important d’avoir un tableau de bord plus complet des différents éléments qui déterminent la santé économique d’une entreprise ou d’un secteur : investissements en pourcentage de la VA, indicateurs de formation (nombre de travailleurs qui ont bénéficié d’une formation, pourcentage de la masse salariale consacré à la formation…), pourcentage de la VA distribué en dividendes…
Pour respecter le dialogue social
La liberté de négociation collective est une liberté fondamentale. Elle est coulée dans la Constitution belge (article 23*) et dans des textes de l’OIT (convention 98 (1949) et Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail (1998)). La “norme salariale” restreint donc un droit fondamental. Pour Ecolo, il faut faire confiance aux acteurs de la concertation.
*“Le droit au travail et au libre choix d’une activité professionnelle (…) le droit à des conditions de travail et à une rémunération équitable, ainsi que le droit d’information, de consultation et de négociation collective ; et le droit à la Sécurité sociale, à la protection de la santé et à l’aide sociale”.