Le Parlement belge entre dans l’Histoire en reconnaissant les crimes contre l’humanité et le risque sérieux de génocide contre les Ouïghours
C’était dans l’air la semaine dernière. C’est désormais officiel. Après le Canada, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Lituanie et la Tchéquie, le Parlement belge devient la 6e assemblée démocratique au monde à reconnaître les crimes contre l’humanité et le risque sérieux de génocide contre les Ouïghours, en Chine. En commission, les députés – à l’unanimité, moins l’abstention du PTB – ont voté le gel de la Convention d’investissements UE-Chine et la fin de la Convention d’extradition entre la Belgique et la Chine si ces violations perdurent.
Pour le député fédéral Ecolo-Groen, Samuel Cogolati, qui avait été le premier en février dernier à appeler un parlement à reconnaître le génocide ouïghour, il s’agit d’un vote historique encore inimaginable il y a quelques mois : « En 1948, la communauté internationale avait dit “plus jamais ça” et signait une Convention pour prévenir et réprimer le crime de génocide. Aujourd’hui, une large majorité démocratique envoie un signal très fort à Pékin pour faire cesser les atrocités contre les Ouïghours. Pour la première fois, nous tirons les leçons du Rwanda et de Srebenica, nous n’attendons pas et nous agissons avant qu’il ne soit trop tard, en prenant toutes les mesures contre un risque sérieux de génocide en cours. »
Pour rappel, la Convention de l’ONU de 1948 oblige chaque pays non seulement à punir un massacre déjà commis, mais aussi à prévenir tout « risque sérieux » de génocide en cours. La Cour internationale de Justice de La Haye a, en effet, déterminé dans sa jurisprudence que « l’obligation de prévention et le devoir d’agir qui en est le corollaire prennent naissance, pour un État, au moment où celui-ci a connaissance […] de l’existence d’un risque sérieux de commission d’un génocide ». Or, les preuves se sont accumulées ces derniers mois, notamment grâce aux enquêtes d’Amnesty International et Human Rights Watch, sur les graves persécutions dans les camps, comme les stérilisations forcées et séparations d’enfants arrachés de leurs parents ouïghours. Un rapport a même indiqué que le taux de natalité au sein de la population ouïghoure avait chuté de 48,74% entre 2017 et 2019. Une analyse juridique indépendante, co-signée par 30 experts en droit international et sinologie, a aussi conclu à l’existence d’un génocide.
« Il faut oser se lever contre les discriminations et graves violations des droits humains, partout, sans relâche! Et c’est ce que nous venons de faire en brisant le silence, même face aux sanctions d’un pays puissant comme la Chine. Notre message est sans équivoque: peu importe la religion ou la couleur de peau, nous avons toutes et tous un droit fondamental à la dignité. Aujourd’hui, notre petit pays est grand, car nous avons osé sauver un peu d’humanité », conclut Samuel Cogolati.