14. Revaloriser les pensions et améliorer qualité de vie des aînées et aînés

Retour au chapitre Une société plus juste

14.1. Poursuivre l’augmentation du montant des pensions via le maintien de la liaison des pensions au bien-être, le renforcement du premier pilier de pension avec un taux de remplacement plus élevé, l’amélioration de la GRAPA et une solidarité entre les très hautes et les plus basses pensions.

Un système de pension doit avoir un double objectif : maintenir un niveau de vie décent pour nos pensionné·es et les protéger de la pauvreté. Chaque pensionné·e doit pouvoir vivre dignement.

De plus, il faut renforcer le premier pilier de pension (la pension légale). Nous souhaitons relever le taux de remplacement des pensions légales et ainsi tendre progressivement vers une harmonisation des montants et l’égalité entre tous les travailleurs et travailleuses quel que soit leur statut professionnel. Pour augmenter le montant des pensions, nous voulons relever le taux de remplacement vers celui des pensions des fonctionnaires statutaires. Il s’agit également de relever le plafond salarial à partir duquel est calculée la pension, et d’assurer, pour les pensions les plus anciennes et les plus basses, le rattrapage nécessaire pour compenser la perte de revenus qui en découle.

Nous voulons instaurer une liaison automatique des pensions à l’évolution du bien-être, et revaloriser la GRAPA (garantie de revenus aux personnes âgées) en permettant son cumul avec les allocations versées en lien avec un handicap. Enfin, nous voulons développer la solidarité entre les hautes pensions et les plus basses pensions, c’est-à-dire défendre les dispositifs solidaires au sein des pensions (pension minimum, assimilation, …) en garantissant le financement juste et redistributif de ces dispositifs.

14.2. Réduire les inégalités de genre, notamment en protégeant les périodes assimilées et en diminuant les écarts de pension.

L’écart entre les pensions des femmes et des hommes peut atteindre 30 %. Cette inégalité est due au fait que les femmes sont nombreuses à effectuer une carrière dans des emplois à temps partiel et/ou à avoir des carrières fractionnées et qu’elles sont sur-représentées dans des métiers aux faibles rémunérations.

Un système de pension basé uniquement sur la carrière perpétue les inégalités encore trop souvent vécues sur le plan professionnel entre les femmes et les hommes.

Pour le futur, nous voulons que toute mesure en matière de pension soit analysée en fonction de son impact en matière d’égalité de genre. En attendant, nous voulons prendre des mesures pour rétablir l’égalité, notamment en protégeant les périodes assimilées et en répartissant les droits de pension entre membres d’un même couple (splitting), tout en veillant à la protection des ménages à faibles revenus et en ouvrant la réflexion sur la dimension familiale des pensions. Nous nous opposons à tout relèvement d’âge de la pension de survie et nous voulons supprimer la discrimination envers les personnes qui vivent en cohabitation légale.

Afin de parvenir à plus d’égalité dans le montant des pensions des femmes et des hommes, il faut aussi travailler en amont et promouvoir l’accès des femmes aux emplois de qualité, revaloriser les salaires dans les métiers essentiels et renforcer les services collectifs d’accueil des enfants.

14.3. Renforcer les possibilités de fins de carrière harmonieuses via la généralisation du Plan Tandem.

Près de la moitié des personnes qui travaillent et qui sont en incapacité de travail depuis plus d’un an ont entre 55 et 64 ans.

Il est indispensable d’agir sur les conditions de travail en fin de carrière, afin que celle-ci puisse être vécue de manière positive et soutenable.

Pour cela, nous voulons généraliser le Plan Tandem, ce dispositif de transition progressive vers la pension qui permet une diminution du temps de travail des travailleuses et travailleurs plus âgés au bénéfice de celles et ceux qui débutent. Ce système permet une gestion plus soutenable des fins de carrière ainsi qu’une transmission de connaissances.

Le système des emplois de fin de carrière (crédits-temps permettant une réduction du temps de travail avec une allocation de l’ONEM) doit être soutenu. Il convient également de garantir les exceptions qui permettent de prendre ce crédit-temps à partir de 50 ans (métiers lourds) en les inscrivant dans la loi, et de rétablir les allocations pour les crédits-temps de fin de carrière à partir de 55 ans (cette période doit être assimilée pour la pension).

Enfin, il faut rendre la CCT 104 plus effective. Cette convention collective de travail prévoit que toute entreprise de plus de 20 employé·es doit rédiger un plan pour l’emploi afin d’augmenter ou de maintenir le nombre d’employé·es de 45 ans et plus, avec des mesures spécifiques pour celles et ceux-ci.

14.4. Fixer l’âge du départ à la pension en tenant compte de la durée et de la pénibilité des carrières pour la définition de l’âge et du montant de la pension.

Aujourd’hui, l’âge de la pension est fixé à 67 ans. Il est important, non pas de se focaliser sur l’âge légal pour fixer le départ à la pension mais plutôt sur la durée de la carrière et la pénibilité de celle-ci.

Après 42 ans de carrière, le droit au départ à la pension doit être garanti. Après 45 ans de carrière, la pension complète est garantie.

Nous voulons aussi une meilleure prise en compte de la pénibilité de chaque carrière dans le calcul de l’âge d’accès à la pension et du montant de la pension. Les personnes ayant exercé un métier pénible doivent avoir accès plus tôt à la pension anticipée et à une intervention dans la perte de revenus.

14.5. Mettre en œuvre une « garantie d’autonomie », à savoir une cotisation solidaire permettant d’améliorer l’accessibilité des services d’aide pour les personnes en perte d’autonomie, et les accompagner là où elles ont décidé de vivre.

À côté de la pension, nous voulons mettre en œuvre un dispositif capable d’accompagner l’augmentation des besoins liés à la perte d’autonomie.

Un tel dispositif doit être basé sur des mécanismes de financement et de rétribution solidaires et universels, et reposer, ainsi, sur un financement proportionnel aux revenus. Il doit être organisé par les pouvoirs publics.

Cette aide doit garantir l’accès aux services qui permettent d’apporter des réponses adéquates aux situations de perte d’autonomie, que ce soit au domicile ou hors domicile (centres de jour, centres de revalidation, aide aux déplacements, hébergement…).

L’avenir est à l’aide à domicile, aux centres de jours, aux réseaux d’entraide de quartier. Le transfert vers des maisons de repos des personnes en perte d’autonomie est souvent douloureux et coûteux. Il faut dès lors mieux soutenir les solutions qui permettent d’éviter de recourir aux maisons de repos en désespoir de cause.

Nous voulons développer et renforcer les aides pour l’adaptation des logements (primes, crédits à taux zéro, accompagnement architectural …), ainsi qu’alléger les procédures administratives.

Nous voulons aussi renforcer les services d’aide et de soins à domicile et garantir qu’ils soient accessibles à toutes et tous. L’offre d’aide et de soins à domicile doit être suffisante et abordable. Nous plaidons pour une approche interdisciplinaire et territorialisée permettant la mise en réseau des différents prestataires venant en soutien aux personnes en perte d’autonomie.

Les personnes de 65 ans et plus doivent pouvoir faire reconnaître leur « handicap ».

Il faut également faciliter la vie des aidant·es-proches, en renforçant leur statut avec un régime de congé suffisant et une indemnisation revalorisée.

14.6. Renforcer la participation citoyenne et sociale des aîné·es et lutter contre l’âgisme, notamment en soutenant les dispositifs locaux de participation.

L’âgisme (stéréotypes et préjugés en lien avec l’âge) contribue au mal-être de celles et ceux qui le subissent, et créent une forme de relégation inacceptable des personnes âgées. Nous voulons renforcer la participation des aîné·es dans tous les pans de la société en leur permettant effectivement de prendre toute leur place dans la vie politique, sociale et culturelle.

Sur le plan communal, il faut soutenir le développement des VADA (Ville Amie Des Aînés), systématiser le Conseil Consultatif Communal des Aînés (CCCA), et développer des « Maisons des aîné·es ». Il faut également soutenir les associations locales qui luttent contre l’isolement des aîné·es.

Il est également essentiel de promouvoir des politiques d’aménagement du territoire qui portent une vision inclusive de l’espace public où les aîné·es ont toute leur place. Cette plus grande diversité des usages et des publics permet de sortir de la « ville à habiter » pour la transformer en « ville à vivre » et où il fait « bon vivre ».

Il faut aussi améliorer l’accès aux transports en commun et aux taxis sociaux, et renforcer l’accessibilité des lieux pour que les aîné·es (tout comme les personnes en situation de handicap) puissent participer à la vie sociale.

Nous voulons également rendre plus effectif le droit de vote des aîné·es, en assurant un dispositif de véhicules adaptés et en installant davantage de bureaux de vote dans les maisons de repos.

14.7. Réduire la fracture numérique en favorisant l’accès à la formation numérique, et en garantissant un accès physique à tous les services de la vie quotidienne.

Aucune démarche administrative ne peut être exclusivement numérique. Il faut garantir légalement des guichets et services physiques, sans surcoût et avec des horaires appropriés, pour l’ensemble des services publics et d’intérêt général.

Nous plaidons que soient imposés des minimas légaux sur l’accessibilité physique des services publics et d’autres services essentiels tels que les mutuelles, les banques, etc. Nous voulons par ailleurs assurer des formations de qualité pour les personnes à faibles compétences numériques. Notamment en :

  • Développant les Espaces Publics Numériques (EPN) et en élargissant leurs fonctions pour qu’ils deviennent des points d’accès privilégiés et inclusifs pour toute aide informatique ;
  • Formant et déployant des aidant·es au numérique ;
  • Garantissant que le principe d’inclusion by design est appliqué lors de la conception des services numériques : sensibiliser les ingénieur·es responsables et faire participer activement le public vulnérable au processus de conception.

14.8. Soutenir les formes d’habitat solidaire et collectif et les autres formules intergénérationnelles qui peuvent créer du lien et limiter l’isolement.

Pour les aîné·es, il est primordial de pouvoir se sentir « chez soi ». Tous et toutes n’ont pas les mêmes attentes en termes de logement. Il est donc indispensable de diversifier l’offre et d’innover en matière d’habitat et d’urbanisme afin de proposer des alternatives aux formes plus classiques d’hébergement. Ces alternatives permettant le « bien-vieillir ensemble » doivent être proposées à des tarifs accessibles.

Nous voulons définir un cadre et un soutien aux formes alternatives d’habitat, telles que l’habitat solidaire, intergénérationnel, kangourou, groupé, etc., à l’instar du modèle français « Hapi » (habitation accompagnée, partagée et intégrée dans la vie sociale).

Par ailleurs, nous voulons supprimer le statut de cohabitant·e, qui est un frein pour ces formes d’habitat. Tant que ce statut n’est pas supprimé, les régions doivent autoriser la cohabitation (sans perte d’allocation) dans ces cas spécifiques.

14.9. Améliorer la qualité de vie en maison de repos en conditionnant les aides publiques à des projets positifs pour les résident·es et via un renforcement des moyens de lutte contre la maltraitance et la réduction de l’emprise des entreprises commerciales sur le secteur des services aux aîné·es.

Beaucoup de maisons de repos (et de soin) ont été pensées comme des établissements de santé, avec une vision hygiéniste, et non comme des lieux de vie. Il est fondamental d’améliorer ces espaces de vie pour augmenter le bien-être de celles et ceux qui y résident et qui y travaillent. Nous voulons qu’un pourcentage du subside perçu par la structure soit conditionné à un projet concret pour améliorer la qualité de vie et la participation des résident·es.

Le séjour en maisons de repos (MR) et maisons de repos et de soins (MRS) doit être mieux accompagné là où ce n’est pas le cas. Il est indispensable de renforcer les normes d’encadrement (personnel soignant en suffisance, mais aussi personnel paramédical, accompagnement psychologique…). C’est aussi indispensable pour améliorer les conditions de travail du personnel et renforcer l’attractivité de ces métiers.

La lutte contre la maltraitance doit être une priorité et les inspections et contrôles de qualité doivent être réguliers. Il n’est pas acceptable de générer des profits au départ de financements publics destinés à l’aide et aux soins aux aîné·es. Nous voulons donc réduire autant que possible l’emprise des entreprises commerciales sur le secteur des services aux aîné·es, en particulier en ce qui concerne les MR et MRS. Nous voulons modifier les législations en vigueur afin de limiter le pourcentage de lits qui serait concédé au marché privé commercial.

Il faut garantir l’accès aux MR et MRS aux personnes qui en ont besoin. Pour cela, il importe d’encadrer les coûts d’hébergement, aujourd’hui fortement en décalage avec les montants des pensions.

14.10. Garantir l’autodétermination en matière de soins de santé en associant au maximum les aîné·es dans les choix de soins, en formant mieux les professionnel·les de soins, et en renforçant la prise en charge des soins de santé mentale.

Les aîné·es ne sont pas des « objets » de soins. Il faut pouvoir les impliquer au maximum dans le choix des soins qui leur sont donnés, et cela autant que possible.

A cette fin, nous souhaitons que tout·es les professionnel·les de la santé soient mieux formé·es à cette approche.

Trop souvent, on constate une sur-prescription de médicaments aux personnes âgées. Il faut communiquer plus largement sur la possibilité de faire un bilan régulier, et le systématiser.

Enfin, la santé mentale des aîné·es doit être prise en charge par des professionnel·les formé·es spécifiquement aux pathologies qui peuvent être rencontrées.

14.11. Garantir une fin de vie digne et choisie, en renforçant l’accès aux soins palliatifs et en simplifiant les dispositions de l’euthanasie.

Les aîné·es doivent rester maître·sses de leur fin de vie, et pouvoir choisir où, quand et comment elles et ils souhaitent décéder.

L’accès aux soins palliatifs (que ce soit en milieu hospitalier ou à domicile) doit être renforcé et encore facilité. Des moyens suffisants, humains et matériels, doivent y être consacrés. Nous voulons simplifier les dispositions concernant l’euthanasie.

Les professionnel·les de la santé devraient bénéficier systématiquement d’une formation tant technique que concernant les aspects humains pour accompagner cette fin de vie.

Les « testaments de vie » sont des documents permettent à la personne âgée d’exprimer en amont sa volonté et ses souhaits concernant la phase finale de sa vie dans le cas où elle deviendrait, dans les faits, incapable de le faire. Ce document aborde tant les enjeux de patrimoine que de soins. Nous souhaitons développer le cadre existant en la matière, et mieux faire connaître cette possibilité.