29. Une politique étrangère au service de la solidarité, la paix et le climat

Retour au chapitre Une société plus égalitaire et ouverte

29.1. Atteindre l’objectif des 0,7 %du RNB consacrés à l’Aide Publique au Développement.

L’atteinte de l’objectif de 0,7% du RNB consacré à l’aide publique au développement est plus que jamais nécessaire face aux crises qui fissurent le monde : pandémie de Covid, dérèglement climatique, guerre en Ukraine, sans compter une crise alimentaire alarmante qui découle des trois précédentes. Notre pays s’est engagé à atteindre les 0,7% du RNB en aide au développement en 2030. Pour respecter cet engagement, notre pays doit ancrer dans la loi budgétaire une croissance linéaire et contraignante de l’Aide Publique au Développement (APD). Par ailleurs, notre pays plaidera au sein du Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE pour mettre fin à la comptabilisation de l’« aide fantôme » dans l’APD, comme les frais d’accueil des demandeuses et demandeurs d’asile, les allégements de dettes ou les coûts imputés forfaitairement d’étudiant·es étranger·es. Enfin, indépendamment des montants alloués à l’APD, la Belgique continuera à soutenir des politique d’annulation et d’atténuation des dettes des pays à bas et moyens revenus, tant vis-à-vis de créanciers publics que privés.

29.2. Entamer une réflexion profonde sur notre système de coopération de développement afin qu’il soit en adéquation avec les aspirations des populations bénéficiaires.

Notre modèle de coopération au développement montre ses limites depuis plusieurs années. Les associations du secteur plaident pour une réflexion nécessaire à une évolution vers une coopération qui soit réellement solidaire. Cela passe par un changement de paradigme, qui prend notamment en compte les principes d’Istanbul, publiés par les organisations de la société civile en 2010. Ces derniers plaident pour :

  • Des partenariats équitables et solidaires ;
  • L’apprentissage mutuel ;
  • L’engagement pour un changement positif durable ;
  • Le respect et la promotion des droits humains ;
  • L’égalité et l’équité des genres ;
  • L’autonomisation des personnes ;
  • La participation démocratique ;
  • La durabilité environnementale ;
  • La pratique de la transparence et de la responsabilité.

29.3. Mettre les droits humains au cœur de la politique internationale et faire de la Belgique une référence sur les enjeux sociaux et écologiques ainsi que sur la défense des droits des femmes et des minorités de genre.

Nous voulons que la politique étrangère de la Belgique ait pour priorité la promotion des droits humains et les objectifs de développement durable, et non le seul souci de la diplomatie économique.

Nous souhaitons que Belgique se profile en leadeuse mondiale et en référence internationale en matière de respect d’engagements humains, sociaux et environnementaux, mais aussi dans la protection et la promotion des droits des femmes et des minorités de genre.

Nous souhaitons renforcer la cohérence des politiques avec les objectifs de développement durable, notamment en renforçant les mécanismes de concertation et de suivi des politiques publiques belges, européennes et internationales.

29.4. Soutenir une aide publique au développement orientée vers les pays les plus fragiles, basée sur des partenariats égalitaires en vue de réduire les inégalités Nord-Sud et de réaliser les objectifs de développement durable.

Nous souhaitons assurer l’alignement et l’appropriation démocratique de l’ensemble de l’aide publique au développement, et éliminer toute forme de conditionnalité liée aux intérêts propres de la Belgique ou de l’UE, qu’ils soient économiques, migratoires ou sécuritaires.

Nous souhaitons maintenir un soutien structurel aux organisations non gouvernementales de la coopération au développement, tout en garantissant leur autonomie.

Nous veillerons à ce que le soutien au secteur privé et à la Banque BIO (Société belge d’Investissement pour les Pays en Développement) s’aligne bien sur les priorités de la coopération belge au service des objectifs de développement durable.

En ce qui concerne l’aide humanitaire, nous poursuivrons le soutien structurel à ce secteur afin de répondre aux multiples crises tant nouvelles que les crises dites « oubliées » et nous garantirons aux ONG l’accès aux fonds flexibles.

Enfin, nous renforcerons l’éducation à la citoyenneté mondiale et solidaire en Belgique, en y consacrant au minimum 3% du budget de l’APD, et soutiendrons le secteur dans son ensemble dans son processus de décolonisation.

29.5. Protéger davantage les travailleurs et les travailleuses des organisations humanitaires, par une meilleure analyse des risques encourus, un cadre légal renforcé de protection de leurs activités et un statut international ad hoc.

Le nombre d’incidents visant les travailleuses et travailleurs des organisations humanitaires demeure très préoccupant. En 2022, 444 travailleuses et travailleurs humanitaires ont été touchés dans l’exercice de leur fonction, pour un total de 116 décès. Or ces actes hostiles constituent des obstacles majeurs à l’accès à l’aide humanitaire des populations qui en ont besoin, et que le droit international leur garantit. Nous souhaitons :

  • Renforcer les cadres de protection des humanitaires sur le terrain, par le biais notamment d’efforts diplomatiques renouvelés ;
  • Mieux documenter et analyser les attaques subies par les humanitaires et les risques qu’ils et elles encourent à travers le monde, en prenant en compte la tendance à la criminalisation des actions de solidarité ;
  • Définir un statut international propre aux acteurs et actrices humanitaires valable en toute circonstance, y compris dans le cadre d’une réponse aux catastrophes naturelles ou de l’assistance aux migrant·es ;
  • Créer au sein des Nations Unies une fonction de rapporteur·euse spécial·e en charge de l’amélioration de la protection de l’action humanitaire ;
  • Améliorer tant la qualité que la quantité des poursuites légales contre les auteurs d’attaques envers les travailleurs et travailleuses des organisations humanitaires. Celles-ci doivent notamment être soutenues financièrement pour disposer des moyens leur permettant de recevoir réparation et justice.

29.6. S’engager pour la reconnaissance des réfugié·es climatiques.

L’impact des changements climatiques se fait sentir maintenant partout autour du globe et touche au premier rang les plus vulnérables et les populations du Sud. D’importants déplacements (internes et internationaux) de populations ont déjà eu lieu et risquent de s’accroître dans les années à venir. Dans ce contexte, il est donc indispensable de reconnaître un statut spécifique aux réfugié·es climatiques au niveau national et international, et d’agir pour leur protection, sous l’égide de l’ONU.

29.7. S’opposer au Mercosur, dénoncer et sortir du Traité sur la Charte de l’Énergie (TCE) et faire de l’Europe le premier continent fair trade en mobilisant la politique commerciale européenne pour entraîner nos partenaires commerciaux dans une transition écologique et solidaire.

La politique commerciale européenne doit être utilisée pour entraîner nos partenaires commerciaux dans une transition écologique et juste ; cela vaut également pour notre approche à l’égard de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Les Objectifs de Développement Durable et la promotion des droits humains doivent en être la boussole. Les accords commerciaux doivent s’inscrire dans une perspective de respect et de bonne mise en œuvre des traités environnementaux et climatiques (Montréal, Paris) et des conventions pertinentes de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), y compris celles ayant trait à l’égalité entre les genres et aux services d’inspection du travail et pour appliquer le (nouveau) principe fondamental de droit à un environnement sain au travail. Des sanctions proportionnées et graduelles doivent être appliquées le cas échéant.

Il faut mettre à l’ordre du jour la révision des vieux accords ou mobiliser l’existence de mécanismes internes pour les mettre en adéquation avec ces impératifs.

La société civile doit être davantage informée, impliquée et entendue dans la conception, l’exécution, la mise en œuvre et l’évaluation des accords de commerce. Le Parlement européen doit avoir son mot à dire dans le mandat de négociations de tels accords.

La politique commerciale passe également par des mesures dites « autonomes », décidées par l’UE seule. À ce titre, le recours à des clauses-miroirs peut s’avérer nécessaire pour que les importations de produits respectent les normes fixées aux producteurs européens. Le règlement sur le travail forcé devra être mis en place. La réforme du code douanier sera un élément essentiel pour éviter que des importations non-durables ne nuisent aux ambitions sociales, environnementales et sanitaires de l’UE. La Directive sur le « devoir de vigilances des entreprises » permettra d’imposer aux entreprises européennes de veiller aux conditions sociales et environnementales dans leurs chaînes d’approvisionnement. Il s’agit également d’appliquer et de mieux contrôler les règles certes minimalistes issues du règlement « minerais de sang ».

L’UE mobilisera ses instruments financiers et d’assistance technique pour aider les pays partenaires à accomplir leur transition et en fonction de leurs propres points de départ, enjeux et préoccupations.

L’UE doit prendre des initiatives dans le cadre de ses relations bilatérales avec ses partenaires commerciaux, dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce, des plateformes telles que le G7 et G20 et lorsque cela s’avère nécessaire, par le biais de mesures unilatérales, autonomes (comme le CBAM, le règlement anti-déforestation et la Directive sur le devoir de vigilance des entreprises). Elle doit aussi contribuer à faire advenir le Traité sur les entreprises multilatérales et les droits humains. À l’inverse, elle doit dénoncer les traités tels que le Traité sur la Charte de l’Énergie lorsqu’ils constituent des obstacles à une transition écologique et sociale. Dans le même esprit, les traités qui contiennent des mécanismes de règlement des différends privilégiant les investissements étrangers et minant les processus de prise de décision par les autorités publiques doivent être combattus.

Le texte du Traité Mercosur reste, à ce jour, inacceptable. Sans évolutions substantielles, nous continuerons à nous y opposer.

29.8. Consacrer au moins 15 %du budget de la Coopération au développement à la réalisation du droit à l’alimentation, par l’appui aux organisations paysannes et de femmes rurales, ainsi qu’aux politiques publiques renforçant la souveraineté alimentaire des pays partenaires.

Les populations paysannes et rurales représentent 80 %des personnes les plus affectées par la pauvreté et la faim (FAO, 2022). Elles sont notamment victimes d’accaparement de leurs terres et de leurs ressources naturelles dont elles dépendent pour leur survie. Elles sont par ailleurs de plus en plus exposées aux impacts du dérèglement climatique et de l’effondrement de la biodiversité. Le droit à l’alimentation doit être placé au centre des politiques publiques, aussi à l’international, et opérer une transition vers la souveraineté alimentaire et l’agroécologie.

29.9. Soutenir l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine au sein de ses frontières reconnues internationalement.

Nous soutenons l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine au sein de ses frontières reconnues internationalement. La Russie doit donc revenir à ses frontières d’avant 2014. L’intégration de l’Ukraine dans l’UE et dans l’OTAN n’est pas un tabou, mais celle-ci doit s’envisager dans le respect des standards démocratiques, politiques et économiques auxquels les pays qui souhaitent devenir membres de l’UE doivent se soumettre.

Il faut amener l’Ukraine à ratifier les annexes du Traité de Rome. Il faut donc marquer le soutien aux instruments existants comme la CPI ou le procureur fédéral ukrainien via Eurojust dans les déclarations vis-à-vis de l’Ukraine, de même que la lutte contre l’emploi d’armes que la Belgique ne reconnaît plus, à l’exemple des armes à sous-munitions.

29.10. Soutenir l’adhésion des pays candidats à l’Union européenne, notamment des Balkans occidentaux, sous réserve du respect de l’ensemble des critères d’adhésion.

Outre l’Ukraine, plusieurs pays européens sont candidats ou candidats potentiels à l’adhésion à l’Union européenne. Certains le sont depuis plus de 10 ans. Nous soutenons leur processus d’adhésion et d’intégration. Afin que leur entrée au sein de l’Union se fasse sereinement, les pays candidats doivent remplir les critères d’adhésion, c’est-à-dire le critère politique (institutions stables et démocratiques et adhésion aux valeurs européennes), le critère économique et l’aptitude à assumer les obligations découlant de l’acquis communautaire. L’Union européenne doit, quant à elle, soutenir ces pays dans leurs transitions via des programmes et aides financières européennes. Nous devons également nous assurer que l’UE et ses institutions sont prêtes à intégrer de nouveaux membres que ce soit économiquement ou en termes procéduraux. Plus il y a d’États membres, plus les risques de blocage sont grands. Nous devons garantir le bon fonctionnement et l’efficacité des institutions et des processus décisionnels européens (exemple : suppression de l’unanimité au Conseil)

29.11. Sanctionner les oligarques et les entreprises russes qui financent l’agression contre l’Ukraine, et employer ces fonds pour les consacrer à la reconstruction de l’Ukraine.

Depuis l’invasion de l’Ukraine, 300 milliards d’actifs de la Fédération de Russie et de la Banque centrale russe sont gelés. Une part significative est détenue en Europe. Nous plaidons pour la confiscation de ces fonds et leur transfert vers un compte supervisé de l’ONU dédié à la reconstruction de l’Ukraine. Ainsi les fonds viendraient en déduction des sommes que les institutions devront à l’avenir engager pour la reconstruction de l’Ukraine. Nous plaidons aussi pour un élargissement des sanctions économiques contre l’État russe (gaz, diamants, combustible nucléaire…) et les les oligarques ; et un renforcement de la lutte contre le contournement des sanctions.

29.12. Protéger l’État de droit, la démocratie et les droits fondamentaux au sein de l’Union européenne.

Face aux atteintes graves à la démocratie en Pologne ou Hongrie, ou plus récemment en Grèce, la Commission européenne doit être la garante des traités et activer des procédures d’infraction, conditionner l’octroi de budgets et fonds européens au respect de l’État de droit, la démocratie et des droits fondamentaux, sans attendre des années de dérives autoritaires et de reculs des droits et libertés.

Nous exigeons l’implication du Parlement européen dans les rapports annuels sur l’État de droit mais aussi que les critères évalués soient étendus à l’ensemble des critères de l’article 2 du traité : valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’État de droit, ainsi que de respect des droits humains, y compris des droits des minorités. Les sanctions financières doivent également prendre comme balise ces principes.

Des dérives telles que celles commises par la France avec la répression violente de manifestations ou la Belgique dans le non-respect des décisions de justice ne peuvent rester sans suites et doivent être intégrées à l’évaluation des États membres.

29.13. Développer une Europe de la Défense forte, crédible et ayant une capacité d’action autonome au service d’une véritable politique étrangère européenne, y compris en privilégiant l’achat et l’investissement dans des systèmes d’armements européens.

La guerre d’agression russe a démontré une fois de plus la nécessité pour l’Union européenne de se montrer soudée dans la défense de ses frontières. La réponse européenne a d’ailleurs été plutôt dans le sens d’un retour au projet européen. Néanmoins, il est apparu une fois de plus qu’aujourd’hui l’Union européenne n’est pas en capacité de faire face seule à une menace extérieure. Elle se retrouve bien trop dépendante de l’OTAN, et en particulier des États-Unis. Or, ces dernières années, ses remous politiques internes ont montré que l’allié américain est devenu une source potentielle d’instabilité. Les États-Unis, avant la guerre, avaient par ailleurs décidé de concentrer leurs intérêts géopolitiques sur l’Asie.

Il est donc nécessaire pour l’Union européenne, tout en restant membre d’une OTAN réformée, d’enfin développer un pilier de Défense fort, crédible et ayant une capacité d’action autonome. Cela passe par une mise en commun ambitieuse des forces armées des pays-membres, une identification des manques capacitaires et une suppression des doublons et des surcoûts. L’industrie de défense européenne doit être impliquée dans cette ambition et ses États doivent stopper les projets concurrents entre eux, qui ne font que diviser et ralentir l’Europe de la Défense. Les acquisitions de matériel doivent se faire en vertu de la préférence européenne et avoir un objectif de compatibilité entre les forces armées européennes. Enfin, toutes les synergies entre États membres doivent être facilitées à l’exemple du programme CaMo (Capacité Motorisée) qui unit la France et la Belgique dans une intégration et coopération opérationnelle totale entre les brigades motorisées de nos deux pays

29.14. Engager la Défense comme actrice de la lutte contre le dérèglement climatique et comme agente de la résilience face aux effets de ce dérèglement sur la population, ici et à l’étranger.

Le dérèglement climatique est une des menaces les plus importantes auxquelles le monde doit faire face. Catastrophes climatiques, migrations massives depuis les zones devenues inhabitables, conflits pour les accès à l’eau, recrutement des publics précarisés (notamment par la sécheresse) par des groupements terroristes, etc. La Défense doit s’adapter face à ce défi.

Nous voulons développer l’Aide à la Nation et acquérir plus de capacités duales, c’est-à-dire celles pouvant servir à la fois en opération et en soutien à la population belge en cas de catastrophes climatiques, telles les inondations dramatiques de l’été 2021.

La Défense doit également adapter son fonctionnement en opération. Il est absolument essentiel d’intégrer le changement climatique dans l’évaluation des risques et des stratégies de la Défense, sans quoi les efforts déployés pour construire la paix resteront inefficaces voire contre-productifs. Ainsi, la prise en compte du changement climatique doit occuper une place de choix dans chaque analyse opérationnelle de la Défense.

Enfin, la Défense est une grosse émettrice de gaz à effet de serre (GES) et le secteur de la Défense est aujourd’hui exempté des évaluations globales d’émissions de GES de l’Organisation des Nations Unies décidées dans le cadre des COP. Si la sécurité et la fiabilité occupent, à juste titre, une place centrale dans les achats de la Défense, la durabilité et le respect de l’environnement ne doivent pas en être exclus et une pression doit être exercée sur l’industrie de Défense pour qu’elle se décarbonise massivement.

29.15. Promouvoir un désarmement nucléaire dans un cadre multilatéral. Engager la ratification par la Belgique du Traité d’Interdiction des Armes Nucléaires (TIAN).

Avec la guerre d’agression russe contre l’Ukraine, la menace de l’emploi de l’arme nucléaire n’avait plus été si importante depuis des décennies. Le Traité de Non Prolifération Nucléaire ne fonctionne plus correctement aujourd’hui. Par exemple, le nuclear sharing, qui est un concept illégal en vertu du Traité de Non Prolifération consistant notamment à permettre à des États non nucléaires de stocker des armes nucléaires d’un État allié sur son territoire est désormais une pratique utilisée non seulement par l’OTAN depuis des dizaines d’années mais depuis peu également par le Russie. La Belgique stocke par exemple des armes nucléaires américaines et la Biélorussie stockera des armes russes. Par ailleurs, la Russie a annoncé en février 2023 qu’elle suspendait sa participation au Traité New Start chargé de limiter le nombre de têtes nucléaires possédées par la Russie et les États-Unis (1 550 chacun, ce qui est tout de même très largement suffisant pour anéantir le monde tel que nous le connaissons). Aucun pays au monde n’est en capacité à faire face à une attaque nucléaire, que ce soit en termes logistiques, sécuritaires, sanitaires, médicaux… C’est pourquoi nous plaidons pour une accélération des négociations internationales visant au désarmement nucléaire mondial et à l’interdiction des armes nucléaires. À ce titre, le Traité d’Interdiction des Armes Nucléaires, entré en vigueur le 22 janvier 2021, est une piste intéressante. Nous voulons que la Belgique non seulement signe ce traité et le ratifie mais qu’elle plaide au sein de l’OTAN pour que les autres pays la rejoigne. Bien entendu, ce désarmement nucléaire ne peut se faire que de manière multilatérale.

29.16. Adopter et promouvoir une politique de la défense à visée éthique, notamment à propos de l’interdiction des armes autonomes et des autres systèmes d’armes à haute létalité.

Notre pays doit également jouer un rôle de premier plan dans l’élaboration de traités internationaux d’interdiction des systèmes d’armes problématiques, tels que les systèmes d’armes entièrement autonomes, les armes nucléaires, les cyber-armes à grande échelle, les armes à sous-munitions, les mines antipersonnel et l’utilisation d’armes explosives dans des zones densément peuplées.

29.17. Réformer la commission d’avis sollicitée dans le cadre de l’octroi de licences d’armes par la Wallonie, en y garantissant plus de transparence et des rapports plus précis et plus réguliers.

Le décret armes mis en place sous la législature 2009-2014 sous l’impulsion d’Ecolo a montré sa nécessité et son impact sur la manière dont la Wallonie fait commerce de ses armes. Il est maintenant nécessaire de renforcer la portée de ce décret pour une plus grande transparence dans la manière dont les licences sont octroyées.

29.18. Construire une paix juste et durable au Proche-Orient. Déployer une solution à deux États, mettre fin à l’impunité de l’occupation israélienne, au soutien de sa colonisation des territoires occupés et à la réalité d’apartheid entre Israélien·nes et Palestinien·nes ; soutenir l’émergence d’un État palestinien démocratique.

Ces dernières années nous ont montré l’incapacité de la communauté internationale d’œuvrer de manière unifiée en faveur des droits du peuple palestinien et de sa souveraineté. Le 07 octobre 2023 et les semaines qui ont suivi resteront parmi les heures les plus sombres de la région. Plus de 1.200 Israélien·nes sont mort·es suite aux actions terroristes du Hamas et plusieurs milliers de Palestinien·nes dans la réplique du gouvernement israélien. Ces cinq dernières années, la colonisation n’a cessé de s’intensifier, de même que les violences des colons à l’encontre de la population locale ou encore les exécutions extrajudiciaires ; dont celle d’une journaliste palestinienne. L’année 2022 fut la plus meurtrière depuis de la seconde intifada et les premiers mois de 2023 ont été particulièrement violents sous un nouveau gouvernement israélien comprenant des formations d’extrême droite.

Ces dernières années, de nombreux rapports d’Organisations internationales, israéliennes et palestiniennes, ont affirmé l’existence de faits précis constitutifs d’une politique d’apartheid israélienne à l’encontre de la population palestinienne. Le crime d’apartheid est un crime contre l’humanité qui nécessite une réponse ferme de la communauté internationale. Les écologistes continueront à s’opposer à toutes formes de terrorisme et défendront le droit de n’importe quel État de vivre dans un environnement sûr, tout comme ils refuseront le discours qui tente de rejeter dos-à-dos les responsabilités. Par ailleurs, combattre le terrorisme du Hamas par des bombardements de villes et villages entiers revient à vouloir éteindre un incendie avec de l’essence. Le contexte israélo-palestinien est celui de décennies de dépossession, d’occupation et de colonisation qui constituent autant de crimes de guerre.

Nous réaffirmons aujourd’hui la nécessité d’appliquer immédiatement au niveau belge et européen des sanctions à l’encontre de cette politique, afin de donner une chance à la paix et de faire cesser les cycles de violences. La solution à deux États passe par l’instauration d’un État palestinien pleinement indépendant. Cette nécessité impose aussi l’installation d’institutions palestiniennes basées sur l’État de droit. Il est désormais également nécessaire de soutenir les initiatives démocratiques en Palestine et d’insister notamment sur de nouvelles élections au sein de l’entité. L’objectif d’une paix juste et durable au Proche-Orient ne sera atteignable qu’avec une réaffirmation du respect du droit international comme grille de lecture d’un conflit qui s’enlise depuis des décennies.

Ecolo propose donc :

  • De réactiver immédiatement la solution d’une diplomatie internationale prenant les mesures adéquates, à savoir, notamment :
    • La reconnaissance de la Palestine sur base des frontières tracées par la ligne verte dans le cadre d’une solution à deux États ;
    • La fin de relations commerciales avec les colonies présentes dans les territoires occupés, notamment l’interdiction de l’importation de produits issus des colonies ;
    • Le lancement d’une procédure de reconnaissance internationale du fait d’apartheid à l’encontre des Palestinnien·nes.
  • L’application toute aussi immédiate d’une série de sanctions :
    • L’interdiction et le gel des avoirs des colons, ainsi que des responsables des crimes de guerre perpétrés tant sur le territoire israélien que sur le territoire palestinien ;
    • La suspension des accords d’associations UE-Israël ;
    • La fin de l’exportation d’armes ou de matériel militaire, en ce compris leur transit via la Belgique, vers Israël Par ailleurs, Ecolo demande la mise en place une enquête internationale, indépendante et transparente sur l’attaque terroriste du 07 octobre et sur l’attaque contre la Bande de Gaza qui s’en est suivie. Les acteurs concernés, tant Israéliens que Palestiniens, doivent pour se faire donner accès à leur territoire aux enquêteurs internationaux.

29.19. Instituer un nouveau Traité de Non-Prolifération des Énergies Fossiles.

L’idée du traité de non-prolifération des combustibles fossiles s’appuie sur trois principes fondamentaux que sont la non-prolifération, l’abandon graduel de l’exploitation et la transition juste :

  • La « non-prolifération » consacre l’arrêt progressif de la prolifération du charbon, du pétrole et du gaz, ainsi que la fin de toute nouvelle activité d’exploration et de production. L’Agence internationale de l’énergie le rappelle : « Il y a une opportunité pour un avenir viable mais elle nécessite qu’à partir d’aujourd’hui il n’y ait plus d’investissements pour de nouveaux projets d’approvisionnement » ;
  • « L’abandon graduel » signifie une suppression progressive des stocks et l’arrêt de la production de combustibles fossiles. Au vu des chiffres de 2018, il est estimé que 60 %du pétrole et du gaz ainsi que 90 %du charbon doivent rester dans le sol pour respecter les objectifs climatiques ;
  • Enfin, le troisième principe est la « transition juste » qui sera nécessaire pour limiter les effets sociaux liés à la sortie des énergies fossiles. Ainsi, pour les travailleurs et travailleuses actifs et actives dans les secteurs des énergies fossiles voués à la fermeture, il faut pouvoir assurer une conversion professionnelle.

29.20. Protéger et promouvoir les droits des femmes en mettant en place une politique étrangère féministe.

Les droits des femmes sont encore trop souvent bafoués dans le monde. Les femmes sont globalement plus exposées que les hommes à la pauvreté et à la précarité. En la matière, il nous reste également beaucoup à réaliser pour garantir une égalité réelle entre les femmes et les hommes. Néanmoins, les violences et les sévices subies par les femmes dans certains pays sont inqualifiables, allant de leur éviction des processus démocratiques au recours au viol en tant qu’arme de guerre. Il est indispensable de garantir l’égale participation des femmes aux processus décisionnels et leur inclusion dans le développement économique et social de leurs régions.

C’est en ce sens que l’adoption d’une déclaration de politique étrangère féministe est une opportunité de renforcer et de concrétiser davantage les engagements pris par la Belgique. Il faut accroître le soutien aux mouvements féministes et aux organisations de droits des femmes, renforcer la présence des femmes dans les instances décisionnelles internationales, comme la participation des femmes à la prévention et au règlement des conflits ainsi qu’à la consolidation de la paix, conformément à la Résolution 1325 des Nations Unies. Nous voulons mettre en œuvre une approche qui cherche à déconstruire les différents systèmes de domination à l’origine de formes croisées de discrimination et de marginalisation. Il est temps d’exercer une pression accrue sur les gouvernements des pays concernés par les violences sexuelles utilisées comme armes de guerre afin qu’ils, mettent fin à l’impunité dont bénéficient les responsables de tels crimes et mettent en place un système judiciaire efficace.

D’autre part, face aux nombreux courants conservateurs qui mettent en péril les droits des femmes à décider de leur vie sexuelle et reproductive, il conviendra de porter une attention particulière au financement des programmes internationaux visant à renforcer, dans les pays partenaires et en collaboration avec les communautés locales,, l’éducation sexuelle, l’accès à l’information et à des moyens contraceptifs efficaces pour tou·tes, et l’effectivité des droits reproductifs et sexuels. Par ailleurs, la Résolution 1820 des Nations Unies exige des parties à un conflit de prendre toutes les dispositions nécessaires pour mettre fin aux viols et autres actes de violence sexuelle envers des civils, ainsi qu’à l’impunité dont bénéficient les responsables. Ces dispositions doivent être assorties de mécanismes de suivi efficace et contraignant et doivent être couplées à d’autres politiques, telles que la réhabilitation de l’État de droit, des services de santé et de l’enseignement.

29.21. Promouvoir une réforme de l’ONU et engager au niveau international une approche multilatérale et respectueuse des droits humains.

Afin de donner toutes les chances à l’ONU de remplir au mieux ses missions telles que définies dans sa Charte, un financement conséquent et garanti (pouvant résister aux pressions politiques conjoncturelles) doit lui être attribué.

De même, nous estimons qu’une révision de son mode de fonctionnement est indispensable et doit prendre en compte les principes suivants :

  • Le renforcement du rôle de l’ONU en matière de désarmement, de « sécurité humaine » et de prévention civile des conflits afin d’empêcher les interventions militaires et armées, autant que faire se peut ;
  • La suppression du droit de veto des États membres du Conseil de sécurité ; ce droit doit être remplacé par une procédure de vote à la majorité qualifiée ; dans une période intermédiaire, il est envisageable que le droit de veto dont bénéficient la Grande-Bretagne et la France soit exercé par l’Union européenne ;
  • L’élargissement du Conseil de sécurité à de nouveaux États, afin d’assurer une meilleure représentativité à l’échelle de la planète, notamment dans le sens d’une représentation des ensembles régionaux  ;
  • La contribution de tous les acteurs gouvernementaux et non-gouvernementaux à la réflexion en cours sur la mise en place d’une Assemblée parlementaire des Nations Unies ;
  • L’accroissement de l’implication et du rôle de la société civile au sein de l’ONU, en fonction de son expertise à la fois en amont (connaissance du terrain, détection des conflits et problèmes, …) et en aval (aide à l’élaboration de solutions) ;
  • L’amélioration de la transparence des décisions ; il faut par exemple que les discussions et les débats entre les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité fassent l’objet de comptes rendus écrits et publics ;
  • La constitution d’un droit de la défense par l’obligation pour le Conseil de Sécurité d’auditionner des États susceptibles de faire l’objet de sanctions ;
  • Le renforcement de la présence des femmes aux postes de décisions et la prise en compte de l’impact de la guerre sur les femmes et, partant, l’importance de la participation de celles-ci dans tous les aspects des opérations de maintien de la paix des Nations Unies ;
  • L’amélioration de la formation des soldat·es (pour éviter des phénomènes aussi inacceptables que des viols commis par des Casques Bleus par exemple) et l’augmentation de la participation en troupes des pays occidentaux.