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“Ecolo est du côté des modèles économiques durables et innovants”

Interview de Zakia Khattabi

Zakia Khattabi est née à Bruxelles et y a toujours vécu. En 2009, elle est élue au parlement bruxellois. Elle y devient sénatrice de communauté et cheffe de groupe au Sénat. Elle est la coprésidente d’Ecolo depuis le 22 mars 2015.

Caterpillar, Carrefour, Proximus : des entreprises colossales, qui font des bénéfices, mettent pourtant en place des plans de licenciements massifs…

Le problème fondamental, c’est qu’Arcelor Mittal, Carrefour, Proximus ne sont pas l’expression d’un système malade, mais au contraire le fonctionnement tout à fait normal du système. Ces entreprises maximisent leurs bénéfices par tous les moyens. En soi, on pourrait se dire que c’est leur vocation.

La mienne, par contre, comme responsable politique, c’est d’être garante de l’intérêt collectif et pas d’actionnaires. C’est en ce sens que je souhaite réorienter notre modèle vers une économie plus durable.

Le politique a-t-il encore un rôle à jouer dans une économie dérégulée ?

Malheureusement, le rôle de l’état dans l’économie telle qu’elle est aujourd’hui reste trop souvent un impensé politique. Il faut sortir des cadres de pensée traditionnels, entre « l’état planificateur » qui tend à étouffer l’initiative, et « la main invisible du marché » qui favorise les multinationales, accroît les inégalités et asphyxie les dynamiques locales. Moi je ne veux ni d’un « état interventionniste », ni d’un tout au marché, mais d’un état régulateur, bienveillant, qui accompagne les initiatives : il s’agit de fixer les règles du jeu, de les faire respecter et d’orienter les initiatives économiques vers un modèle plus soutenable. Il est là, le rôle des pouvoirs publics : redonner du sens à l’activité économique.

… Quel sens ?

C’est une question de choix de société. Ecolo défend un modèle économique résilient, ancré dans nos territoires, qui évite aux produits de faire le tour de la planète avant d’arriver dans nos assiettes. C’est un modèle pourvoyeur d’emplois non délocalisables. Nous sommes du côté des modèles économiques durables et innovants : l’économie de la fonctionnalité, l’économie du partage, l’économie circulaire, la production locale, la gouvernance horizontale et la participation des travailleurs… Beaucoup de projets émergent pour répondre autrement aux besoins ou aux défis collectifs et individuels.

Ecolo compte donc sur l’esprit d’entreprise ?

Il y a des alliances objectives. Je l’ai dit précédemment : la résilience de notre économie repose sur son ancrage dans les territoires. Les PME et indépendants sont à cet égard nos meilleurs partenaires. Les indépendants et les PME s’implantent dans le tissu économique mais aussi social et culturel au travers d’activités non-délocalisables, en lien avec les besoins réels, les ressources et les savoir-faire de leurs territoires. C’est précisément pour cela que je veux encourager ceux qui entreprennent, mais aussi les protéger des risques.

Aujourd’hui, ils rencontrent un nombre incalculable de difficultés et paient toujours trop cher l’échec. Beaucoup d’entre eux se trouvent dans de réelles difficultés et il peut vite être difficile de maintenir la tête hors de l’eau. Ils doivent trouver un soutien et de l’encouragement du côté des pouvoirs publics et de l’administration. C’est comme cela qu’on développera les modèles économiques durables et innovants de demain. Oui, les indépendants et les PME sont au cœur du redéploiement économique que nous appelons de nos vœux.

Cela peut paraître surprenant de voir Ecolo du côté des PME et des indépendants ?

Je vous le répète, c’est au cœur même de l’écologie politique : d’une part, parce que notre projet vise l’autonomie et l’émancipation comme valeurs fondamentales, et, d’autre part, parce que nous voulons une économie et un système de production plus résilients. Et ces deux objectifs entrent parfaitement en adéquation avec les indépendants et les PME. Ce qui me pose problème, par contre, c’est le greenwashing ou le capitalisme vert. Cela reste du capitalisme, avec les conséquences d’épuisement des hommes et des ressources que l’on sait. Si l’objectif est uniquement de se donner bonne conscience en continuant dans la même direction, alors c’est non. Et croire que l’on changera en faisant un peu plus de la même chose est évidemment irresponsable. Sans parler de la financiarisation de l’économie : aujourd’hui, elle crée des gains totalement disproportionnés et déconnectés de l’économie réelle, au prix de dégâts sociaux et environnementaux absolument désastreux qui, eux, sont assumés par la collectivité. Regardez chez Carrefour : des milliers d’emplois sacrifiés uniquement pour les actionnaires.

Comment peut-on sortir de cette spirale ?

Les exemples ne manquent pas. Il y a un besoin important dans un grand nombre de secteurs : dans la construction, dans les énergies vertes, dans les services (que ce soit la santé, l’accompagnement des personnes âgées) dans l’enseignement, dans l’alimentation de qualité, dans l’économie circulaire, … La transition écologique et solidaire de nos sociétés est un vivier d’emplois extraordinaire. Des emplois qui créent du sens et du lien. Aujourd’hui, de nombreuses dynamiques se développent et nous voulons leur apporter le soutien structurel dont elles ont besoin. C’est en encourageant et en relocalisant ces secteurs d’avenir que l’on créera une société plus juste, plus prospère, au bénéfice de tous.

Sortir de l’économie du gaspillage

Chaque belge produit en moyenne 1 kg de déchets ménagers par jour. Mais à cela, il faut ajouter jusqu’à 10 kg de déchets industriels quotidiens par habitant : 10 kg invisibles, car ils proviennent des processus de fabrication. Pourtant, ces déchets ne sont pas une fatalité, et l’être humain pourrait rapidement diminuer son empreinte écologique.

Le saviez-vous ? Fabriquer une brosse à dents représente 1,5 kg de « déchets cachés » ; un GSM peut, de la même manière, « peser » 75 kg de déchets, et on peut compter jusqu’à 1500 kg pour un ordinateur. Les problèmes environnementaux que ces déchets occasionnent sont évidents : pollution et gaspillage des ressources sont au rendez-vous.

Face à ce problème central dans une société qui pousse toujours plus loin la consommation matérielle au nom de la croissance, le gaspillage doit impérativement être résorbé. Aujourd’hui, il peut être contenu, par un nouveau type d’organisation économique : l’économie circulaire.

Ses principes sont simples. A chaque étape du développement d’un produit, de sa création jusqu’à la fin de sa vie, les déchets peuvent être minimisés, ou envisagés comme de nouvelles ressources et être réintroduits dans le système. Une démarche qui vise donc, en son cœur, la réduction maximale des déchets et l’économie des ressources.

Trop souvent, nous achetons un produit dont la durée de vie est programmée pour être la plus courte possible. On appelle ça « l’obsolescence programmée ». De cette manière, une fois le produit hors d’usage, nous en achetons un nouveau en remplace-ment et cela profite aux producteurs : au plus la durée de vie d’un produit est courte, au plus nous en consommons. C’est un moteur puissant pour la croissance, mais une pratique hautement dommageable pour le portefeuille et, forcément, pour l’environnement.

A contrario, si un produit est conçu dès le départ pour, à la fois, produire moins de déchets lors de sa production, avoir une durée de vie la plus longue possible, et, une fois hors d’usage, être recyclé au maximum ; si l’énergie utilisée pour le produire est elle-même récupérée ; si les matériaux nécessaires à sa production sont eux-mêmes produits de la façon la plus durable possible… alors nous avons un bien dont l’impact environnemental est extrêmement faible. Et dont les coûts de conception sont également réduits au maximum. C’est une autre manière d’envisager la production, la consommation et la gestion des déchets produits : loin des objectifs de sur¬consommation dont notre société est encore trop imprégnée.

D’une façon plus générale, nous pouvons appliquer les principes de l’économie circulaire dans notre vie de tous les jours. Par un questionnement sur nos besoins réels, par le développement de pratiques « zéro-déchet », par une consommation raisonnée et orientée vers des produits locaux, en essayant au maximum de réparer plutôt que de remplacer, en favorisant le marché de seconde main, en partageant… Pour un projet de société plus en harmonie avec les ressources et avec la planète.

Les brosses à dents… qu’est-ce qu’on en vend !

Une brosse à dents traditionnelle, fabriquée avec du plastique et du nylon, a une durée de vie d’environ trois mois. Elle mettra cependant au minimum une centaine d’années à se dégrader… partiellement. On peut pourtant aujourd’hui concevoir des brosses à dents avec un manche en bambou, produit localement, où l’énergie nécessaire à la production est issue d’une filière de production verte et récupérée au maximum, avec une distribution sans emballages excessifs, distribuées dans des réseaux commerciaux locaux. Après son usage, le manche en bois pourra être composté comme un simple déchet organique, et la partie qui n’est pas biodégradable pourra être presque intégralement recyclée, par la même société qui l’a fabriquée. En sachant qu’en Belgique, il se vend près de 8,5 millions de brosses à dents chaque année… Faites le calcul.

Des idées à l'action

Nos 11 propositions

  • Proposition 1

    Réaliser le programme ambitieux d’investissements BE.Invest dans les secteurs critiques de l’économie (efficacité énergétique, mobilité durable, numérisation, …) pour renforcer la capacité de la Belgique à faire face aux défis du futur.Mettre en place un revenu de base pour les 18-26 ans comme premier élément d’un 6e pilier à créer dans la sécurité sociale.

  • Proposition 2

    Protéger davantage les entrepreneurs en difficulté en leur offrant un droit passerelle, un droit à la seconde chance et en leur octroyant des droits similaires à ceux des salariés en cas de problèmes.

  • Proposition 3

    Simplifier le statut des entrepreneurs en garantissant leur couverture sociale et supprimer la période de carence pour les travailleurs·euses indépendant·e·s afin qu’ils/elles n’attendent plus 14 jours avant d’être indemnisé·e·s en cas de maladie, comme c’est le cas pour les salarié·e·s.

  • Proposition 4

    Intégrer et promouvoir le modèle coopératif dans le code des sociétés et dans « l’économie de plate-forme » et soutenir les expériences de participation des travailleurs dans les organes de décisions des entreprises.

  • Proposition 5

    Inclure des objectifs pour des marchés publics durables, préservés du dumping social et assurer l’exemplarité des pouvoirs publics en la matière.

  • Proposition 6

    Mettre en place une garantie publique pour soutenir le financement participatif.

  • Proposition 7

    Créer un prêt Proxi à Bruxelles sur le modèle wallon pour favoriser le financement par l’épargne des ménages des entrepreneurs qui osent et se développent.

  • Proposition 8

    Soutenir et financer les réseaux de Fablab dans les villes et communes.

  • Proposition 9

    Subsidier les entreprises pour la réalisation d’un audit « Ressources & Énergie » afin d’optimaliser les consommations d’énergie et de ressources.

  • Proposition 10

    Mettre en place une fiscalité modulable en fonction des impacts sociaux et environnementaux des entreprises.

  • Proposition 11

    Réhabiliter les friches industrielles comme espaces prioritaires pour la création de nouvelles activités économiques.

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